© Iwan Baan
Le musée national du Qatar a été dévoilé à la presse en présence de la Sheika Al-Mayassa Bint Hamad Khalifa Al-Thani, présidente de Qatar Museums et de la Sheika Amna, directrice du musée.
De nombreuses personnalités sont attendues pour le vernissage officiel ce soir, dont le Premier ministre français Édouard Philippe ou le couple Nicolas Sarkozy et Carla Bruni.
On ne voit qu’elle en arrivant sur Doha depuis l’aéroport ! Elle, c’est la Rose des sables de Jean Nouvel. La petite roche formée par l’évaporation de l’eau sous l’action du vent dans le désert est devenue géante. Le symbole est évident. Mais il fallait oser. Et surtout en faire une belle architecture, tout à la fois spatiale et sensorielle.
Le bâtiment de plus de 52.000 m2 impressionne d’emblée le visiteur. Il est la nouvelle fierté du Qatar. Avec ses 539 pétales allant du plus petit diamètre (14 mètres) au plus grand (87 mètres), tous de courbure variable, cette Rose des Sables est une curiosité architecturale sublimée par la technologie.
© Iwan Baan
« Pour construire un bâtiment de 350 mètres de long, avec ses grands disques incurvés, ses intersections, ses éléments en porte-à-faux, il fallait relever d’énormes défis techniques, a indiqué Jean Nouvel, lors de l’inauguration à la presse. L’architecture est le langage d’une époque. Celui-ci est à la pointe de la technologie, comme l’est le Qatar, pays en pleine mutation qui, grâce à cette Rose des sables pourra fortement se démarquer sur l’échiquier mondial », a ajouté celui qui a inauguré en novembre 2017 le Louvre Abou Dhabi, autre prouesse technique s’inspirant elle aussi du contexte et de la culture du pays.
« L’architecture est là pour se poser sans cesse des questions. En dix-huit ans, les discussions pour finaliser ce projet à Doha ont été nombreuses, a renchéri Jean Nouvel. Tout d’abord du temps de feu le cheikh Saud bin Mohammed Al-Thani, insatiable collectionneur dont les achats pharaoniques sur le marché de l’art avaient suscité polémique et enquête. Le projet été repris à zéro à l’arrivée, en 2013, de la Sheikha Al-Mayassa bint Hamad bin Khalifa Al-Thani, soeur de l’émir du Qatar, qui préside aujourd’hui la Qatar Museums Authority (QMA). »
Mais tout en étant une prouesse architecturale, il n’est pas trop ostentatoire. Sa couleur beige sable (la peau du bâtiment a été réalisée en béton fibré à hautes performances) est celle du sable du désert. Discrète, elle est changeante selon les heures du jour. Pour se fondre avec la mer. Ces deux éléments forts de la géographie du pays reviennent sans cesse dans le discours de l’architecte qui a aussi conçu la muséographie intérieure: un parcours où l’on passe de plafonds bas à de grandes échappées, avec un sol toujours en pente, des murs jamais droits, hommage à son maître Claude Parent, le roi de la ligne oblique...
Totale immersion
Le parcours muséographique est aussi une surprise. Nous ne sommes pas dans un musée classique avec des oeuvres accrochées sur les murs. D’ailleurs, il n’y en a pas. Ce qui a du reste suscité bien des interrogations, voire des critiques, avant même l’ouverture de cette Rose des sables qui s’apparente plus à un musée des arts et traditions populaires qu’à un musée d’art au sens strict du terme. Le but est de plonger le visiteur dans une totale immersion, visuelle, sonore et parfois physique car on y perd ses repères.
Sur 7 000 mètres carrés d’espace d’expositions permanente (1 700 pour celles temporaires), le parcours raconte en images - les objets n’étant souvent là que pour appuyer le propos - les différents visages du Qatar et de son histoire. Produits par des réalisateurs et des vidéastes (Land and see dirigé par Jacques Perrin et Christophe Cheysson ou The coming of oil par Doug Aitken), ces films de courte durée (de 3 à 20 minutes) sont des témoignages poétiques et évocateurs des époques passées.
En mouvement, la Rose des sables est construite autour du Palais royal de cheikh Abdullah bin Jassim Al Thani, joyau patrimonial du Qatar nouvellement restauré. Il donne sur la grande place que l’architecte assimile à un «caravansérail, lieu de rencontres et d’animation». Les disques de la rose forment comme un matelas protecteur contre le soleil. Ils créent des ombres pour rendre le bâtiment efficient sur le plan énergétique.
En contrebas, donnant sur la corniche, un bassin est animé par les 114 fontaines en forme d’arabesques de Jean-Michel Othoniel. C’est l’une des commandes passées à des artistes contemporains internationaux pour ancrer ce musée dans le XXIe siècle.
© Iwan Baan
Source : Le Figaro